L'IA comme muse ? Premiers tests pour un projet de second roman

Jsa #44 -

Ou comment repenser l’isolement du processus créatif

Dans ma dernière newsletter, j’évoquais le lancement d’un test d’outils d’Intelligence Artificielle - d’IA générative plus précisément — pour évaluer s’ils permettent de me soutenir dans mon processus créatif, voire de l’accélérer.

Mon projet de second roman et un projet d’essai en cours sont deux parfaits écrins pour cette expérimentation clairement dans l’ère du temps. Avec l’émergence de cette nouvelle technologie ces deux dernières années, les impacts se font de plus en plus sentir dans tous les secteurs, y compris la littérature. Mais cela reste encore timide, notamment en France.

En tant qu'autrice, je souhaite donc utiliser des outils d'IA générative pour m'aider à conceptualiser mon prochain roman. Le thème ? L’amour durable.

Voici un retour d’expérience sur ma première phase d’expérimentation qui a eu lieu ces deux derniers mois.

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Enjoy,

Raphaëlle

Phase 1 : Brainstorming avec ChatGPT

J'ai commencé par rédiger manuellement une quinzaine de prémisses basées sur la méthode de "The Anatomy of Story" par John Truby. Mais rapidement, j'ai eu l'impression de tourner en rond. J’ai peut-être été peu inspirée au moment de m’y mettre ou je ne parvenais tout simplement pas à décupler ma créativité. Les prémisses se ressemblaient un peu trop et, surtout, ils manquaient de profondeur. C'est là que j'ai décidé de commencer à expérimenter avec l’outil de genAI le plus connu : ChatGPT.

J'ai d'abord demandé à ChatGPT de proposer des prémisses basées sur mes idées initiales. Les résultats étaient mitigés : certaines idées avaient du potentiel, d'autres étaient trop banales. Cela donnait une forte impression de “déjà vu, déjà lu” ou d’idées farfelues que je ne me voyais pas explorer.

Pour pousser l’expérimentation, j'ai tout de même demandé des prémisses plus originales, mais l'IA est partie dans des directions trop fantastiques ou futuristes pour mon projet.

Plus original, dans ce contexte pour ChatGPT, prenait forcément la forme de romans d’anticipation ou de science-fiction. Trouvaille intéressante mais je ne m’y retrouvais pas.

Après quelques ajustements dans mes requêtes, j'ai obtenu des propositions plus en phase avec ma vision et mes envies : ancrées dans notre époque actuelle et centrées sur des dynamiques relationnelles sur lesquelles je me voyais écrire quelques années.

Voici quelques exemples de consignes pour aider l’outil à affiner ses propositions :

Ce qui m'a frappée, c'est la capacité de l'IA à itérer sur les idées précédentes tout en apportant de nouvelles nuances. Avec les bonnes consignes — prompts en anglais — la direction à prendre se concrétisait.

Phase 2 : Sélection des prémisses “à la main”

Avec une cinquantaine de prémisses en main (48 exactement), j'ai entamé un processus de sélection purement humain. Sur plusieurs semaines, j'ai laissé les idées décanter, y revenant régulièrement pour affiner mon choix. Là, aucun support IA, juste mes neurones et ma créativité — quelle que soit sa forme — collaborant dans les coulisses de mon esprit pour m’orienter peu à peu dans la direction créative que je souhaitais adopter.

De 48 prémisses, je suis passée à 15, puis à 5, et enfin à 2. Fin juillet, j'ai enfin fixé mon choix final, en sélectionnant un qui me satisfaisait. Pleinement ? Pas encore. Il fallait encore trouver la formulation la plus aboutie possible.

John Truby dans son ouvrage conseille de prendre son temps sur cette phase de prémisse car elle est stratégique. Une fois finalisé, il agit à la fois comme colonne vertébrale et comme boussole tout au long du processus d’écriture.

Phase 3 : Reformulation et peaufinage avec Claude 3.5

Pour la touche finale, j'ai utilisé Claude 3.5, un autre outil de genAI plus performant encore que ChatGPT lorsque l’on touche au rédactionnel, à la langue, aux enjeux de (re)formulation. J'ai engagé une conversation pour obtenir un retour sur ma prémisse choisie et perfectionner sa formulation.

D’entrée de jeu, Claude m'a fait un retour sur la démarche et m’a proposé trois versions retravaillées, dont qu'il recommandait, arguments pertinents à l'appui. L'expérience était étonnamment naturelle, comme si je conversais avec un pair ou un mentor plutôt qu'avec une machine.

Pour pousser l’exercice, je lui ai également demandé son avis sur l’efficacité de la prémisse, en donnant plus de contexte encore.

Réflexions finales

Cette première phase d’expérimentation confirme certains postulats :

• les outils d'IA générative aident à la création littéraire, en tant que catalyseurs, nous poussant à explorer des territoires que nous n'aurions peut-être pas envisagés.

• l’échange avec l’IA doit être envisagé comme une conversation, un ping-pong créatif pour lequel les clarifications, ajustements et corrections sont nécessaires pour en tirer le meilleur parti

• l'aspect le plus crucial demeure le jugement et la sensibilité de l'auteur. L'IA peut générer des idées, mais c'est à nous de discerner celles qui résonnent vraiment avec notre vision artistique.

Prochaine étape ? Vous faire part de mes expérimentations dans le cadre de mon projet d’essai cet automne.

Et vous, avez-vous déjà expérimenté l'IA dans votre processus créatif ?

Envie de découvrir mon premier roman Les pavés du pardon ?

Il est disponible sur le site des éditions Brandon, sur le site des librairiesindépendantes.com et en commande auprès de n’importe quelle librairie en France.

Enjoy ;)