Les auteurs n'échappent pas aux stéréotypes de genre : Heidi vs Howard
newsletter #31 Je suis auteur
Mes récentes lectures m’ont conduite à considérer un sujet :
savoir qu’un livre a été écrit par une femme ou par un homme impacte-t-il notre perception et de quelle manière ? Bref, à quel point sommes-nous influencés par des stéréotypes de genre lorsqu’il s’agit de livres et de leurs auteurs ?
Ces questions sont vite répondues : oui.
Ignorer le sujet ou prétendre que ces stéréotypes n’existent pas aujourd’hui ne changera rien à la réalité : il faut composer et oeuvrer à leur disparition.
On s’attend souvent à ce qu’un auteur de thriller soit un homme et qu’une romance ait été écrite par une femme, pas vrai ? Cela peut nous désoler ou nous être indifférents, ce genre de perception est encore trop présente.
Alors comment les modifier ? En avoir conscience, est-ce que cela suffit à s’en délivrer ?
C’est ce dont j’avais envie de vous parler aujourd’hui, alors bonne lecture !
Raphaëlle
Au fait, mon roman Les pavés du pardon sort en 2023 aux éditions Brandon ! Plus que quelques mois à attendre…
Vous aussi, vous avez hâte ? ;)
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Et rendez-vous le 14 janvier pour la rentrée littéraire hivernale de Brandon & Compagnie sur Grenoble pour ceux qui pourront être sur place :)
Transposer l’étude de cas Heidi vs Howard d’Harvard…
Mais qui sont Heidi et Howard ? Des personnes fictives (mais inspirées d’une personne réelle pour Howard) mobilisées dans une étude de cas à la Columbia Business School qu’évoque Sheryl Sandberg dans son très bon essai “Lean in” que je viens de terminer.
L’étude consistait à présenter à un panel d’étudiants deux CVs à évaluer. Parcours et formation identiques. Seule différence ? Le nom de la personne : Howard ou Heidi.
Alors que la majorité du panel considérait Howard de manière positive et se projetait dans le fait de collaborer avec lui, Heidi, au contraire, était perçue de manière négative : carriériste ou encore antipathique là où Howard avait été valorisé pour son ambition et son potentiel de collaboration…
Quelle explication peut-on avoir de ce phénomène Heidi vs Howard ? C’est la pénalité de “likeability” comme la nomme Sheryl Sandberg, avec laquelle doivent composer les femmes. L’ambition a un coût, celui d’être apprécié. On s’attend à ce que les femmes soient gentilles, emphatiques, prêtes à aider les autres en mettant leurs besoins au-devant des leurs.
…au monde littéraire : des stéréotypes qui pèsent.
Retrouve-ton ce phénomène parmi les auteurs ? Affirmatif.
Il suffit de considérer le nombre de femmes ayant dans l’Histoire adopté un pseudonyme masculin — parmi lesquelles George Sand et Charlotte Brontë. Et si le phénomène peut paraître plus marginal à notre époque, cela ne protège pas les autrices d’être bien plus jugées que leurs homologues masculins : dans leur oeuvre comme dans leur vie privée.
Je pense aux propos de Leïla Slimani qui doit justifier du fait qu’elle fasse garder ses enfants pour qu’elle puisse écrire en toute tranquillité dans son bureau. Etiquettée pour un comportement qui n’aurait soulevé aucune question si elle avait été un homme…
Ou encore l’autrice turque Elif Shafak — dont je suis une grande admiratrice pour la qualité de ses romans — qui, dans son ouvrage Black milk, aborde la possibilité, ou non, pour les femmes de combiner carrière et famille, écriture et grossesse. Et tous les défis et obstacles qui se présentent, quel que soit leur choix.
Des écrivains masculins mis en lumière pour des écrivaines trop souvent reléguées à l’ombre.
Rues et places publiques, prix littéraires, textes étudiés à l’école et à l’université : les écrivains occupent une place écrasante par rapport aux écrivaines dans notre vie quotidienne.
Faites-le test : sur 10 auteurs que l’on vous demande de recommander, combien d’hommes et combien de femmes citerez-vous ?
En tant qu’autrice en devenir, ce sujet me touche au premier plan.
La bonne nouvelle ? Je n’ai ressenti à aucun moment le besoin d’adopter un pseudonyme masculin pour garantir que l’on prenne au sérieux, que l’on considère mon manuscrit pour publication.
Néanmoins, le #balancetonéditeur tout comme le refus d’améliorer les conditions du congé maternité pour les autrices professionnelles sont des signes visibles du chemin qu’il reste à parcourir.
Alors que faire ?
Une attention à porter à la question du genre, sans en faire une obsession
Evitons d’en faire le seul critère de sélection des auteurs que nous lisons - mais le genre demeure une question majeure dans le monde littéraire aujourd’hui.
Pourquoi existe-t-il des prix littéraires dédiés aux femmes et des prix littéraires ouverts à tous ? Preuve que nous avons toujours un besoin de discrimination positive dans le monde du livre aujourd’hui ? La question demeure ouverte, d’autant plus que des prix initialement “genrés” comme le Femina sont fréquemment decernés à des écrivains.
Allez, pour une dose d’optimisme, rappelons-nous le prix Nobel d’Annie Ernaux ou encore le retentissement du dernier Virginie Despentes.
Auteurs comme autrices, nous avons de beaux jours devant nous, j’en suis convaincue !
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